Le 10 janvier 2024, deux nouveaux « pavés de la mémoire » ont été posés à Bordeaux pour honorer les parents de Boris Cyrulnik, victimes de la Shoa. Ces « pavés de la mémoire », également connus sous le nom de « Stolpersteine » (« pierres contre lesquelles on trébuche »), ont été installés au 60, rue de la Rousselle, dernier domicile connu des parents du célèbre neuropsychiatre. Aaron et Estera Cyrulnik, juifs originaires de Pologne, avaient été déportés à Auschwitz en juillet 1942.
Boris Cyrulnik, qui a participé à cette cérémonie, a également commémoré les 80 ans de la rafle du 10 janvier 1944. Pendant cette rafle, il avait été arrêté et emmené à la synagogue de Bordeaux avec 365 autres personnes juives, toutes raflées par les Allemands avec l’aide de la police française. À l’époque, âgé de seulement 6 ans et demi, il avait réussi à se cacher et à éviter la déportation vers Drancy le 12 janvier, ainsi que le camp d’extermination d’Auschwitz le 20 janvier.
L’idée des « pavés de la mémoire » a été initiée par l’artiste allemand Gunter Demnig en 1993, lors de travaux sur les victimes du Mémorial de Yad Vashem à Jérusalem. Cherchant à rendre hommage aux victimes du nazisme, Demnig a utilisé les archives de musées, d’écoles, de mairies, ainsi que les témoignages des survivants et des familles des victimes pour retrouver les données des personnes persécutées, déportées et exterminées pendant cette période sombre de l’histoire. Il a ensuite inséré des pavés gravés d’une plaque de laiton dans les rues publiques, en face de leurs anciens lieux de résidence, pour faire trébucher les passants et les inciter à faire une pause pour se recueillir. Chaque plaque porte l’inscription « Ici habitait » ou « Ici vivait », suivie du nom de la victime, de sa date de naissance et de son destin individuel. Les premiers « pavés de la mémoire » ont été posés en Allemagne en 1995, et depuis, plus de 100 000 pavés ont été installés dans près de 1 800 communes européennes.
Depuis 2017, l’Université Bordeaux-Montaigne a lancé un projet visant à poser quinze « pavés de la mémoire » à Bordeaux, pour honorer les victimes du nazisme. Les deux nouveaux pavés installés cette semaine rendent hommage aux parents de Boris Cyrulnik. Au total, 295 familles, dont 85 enfants, ont été déportées de Bordeaux vers les camps de concentration et d’extermination. Bordeaux, ainsi que la ville voisine de Bègles, sont les premières grandes villes françaises à s’engager dans cette démarche. Cependant, la première Stolperstein posée en France l’a été à Coux, en Charente-Maritime, en 2015. Cette première pierre rendait hommage à Ferdinand Rapiteau, tué en 1941 à Bamberg, en Allemagne.
La pose de ces « pavés de la mémoire » a une signification spéciale pour les familles des victimes. Comme l’a déclaré Maryse Rapiteau, la petite-fille de Ferdinand Rapiteau, lors de la cérémonie à Coux en 2015, cette reconnaissance est un accomplissement pour sa famille, qui est fière de voir tout le travail accompli pour rendre cette cérémonie possible.
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