Une proposition de loi visant à « favoriser » la garde alternée lors de la séparation des parents est prévue pour être débattue au Sénat ce jeudi 14 décembre 2023. Actuellement, la garde alternée reste une option minoritaire lors de la séparation des parents, avec seulement 11,5 % des enfants mineurs vivant en garde alternée, selon l’Insee. La majorité des enfants résident principalement ou exclusivement avec leur mère dans 86 % des cas.

Avant l’adoption de la loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale, la garde des enfants était généralement accordée à la mère lors d’une séparation ou d’un divorce, sauf si elle était dans l’incapacité de s’occuper des enfants. Certaines familles pratiquaient néanmoins la garde alternée de manière informelle, estimant que cette modalité répondait aux besoins de leur enfant et à leur situation de vie.

La résistance au développement de la garde alternée peut être attribuée à plusieurs facteurs. Ils sont liés à des critères tels que la proximité des domiciles, les conditions financières, l’âge de l’enfant, le dialogue parental, bien que la jurisprudence ait retenu que la bonne entente n’est pas nécessaire pour ordonner une garde alternée et que, au contraire, elle peut favoriser l’apaisement des relations. Parfois, l’un des parents refuse simplement de choisir cette option par crainte d’être débouté, de perturber l’organisation existante ou de créer un conflit avec l’autre parent. Il est intéressant de noter que lorsqu’un père demande la garde alternée, elle est accordée dans 86 % des cas, contre 97,2 % des cas lorsque c’est la mère qui la demande. Cette différence de plus de 10 points n’est pas expliquée par les statistiques publiées, ce qui soulève des questions sur les raisons de cet écart.

La proposition de loi présentée par la sénatrice Élisabeth Doineau et ses collègues du groupe Union centriste doit être débattue au Sénat le 14 décembre 2023. Initialement, le texte prévoyait de faire de la garde alternée l’option privilégiée, avec une obligation pour le juge de motiver sa décision s’il choisissait de l’écarter, en considérant l’intérêt et les besoins de l’enfant. Cependant, le texte a été modifié récemment.

La commission des lois a soutenu l’objectif de cette proposition de loi visant à impliquer davantage les deux parents auprès de leur enfant en cas de séparation, mais elle s’est opposée à une systématisation de la garde alternée. Elle a toutefois retenu le principe d’entretenir régulièrement des relations personnelles entre les parents et l’enfant. L’idée est de favoriser les droits de visite et d’hébergement élargis pour le parent qui n’a pas la résidence principale, en encourageant les deux parents à s’investir dans l’éducation quotidienne de l’enfant. Selon Me Barbara Régent, avocate spécialisée dans les modes amiables de règlement des différends, un des parents ne devrait pas avoir à supporter seul la charge de s’occuper des enfants, et il est important de sensibiliser les deux parents à leur engagement auprès de l’enfant.

Cependant, il est nécessaire de réfléchir à la manière de soutenir les parents tout au long de leur parentalité, en prenant en compte les évolutions de la société et les besoins spécifiques des familles contemporaines. Par exemple, il serait important de développer une information préalable obligatoire en mairie avant l’union (mariage ou pacs) sur les aspects de la conjugalité et de la parentalité, des ateliers de parentalité pendant et après la séparation, et d’autres outils pour les juges et les avocats afin de mieux accompagner les couples en situation de conflit.

Certains opposants au développement de la garde alternée mettent en avant les déménagements fréquents qui pourraient être préjudiciables à l’enfant. Toutefois, selon Me Barbara Régent, la garde alternée peut offrir une stabilité supérieure à un droit de visite et d’hébergement élargi qui oblige l’enfant à faire de nombreux allers-retours entre les deux domiciles parentaux. Elle suggère également que la garde alternée puisse être progressive et adaptée à l’âge de l’enfant, avec des arrangements inégalitaires si nécessaire. Elle plaide en faveur d’une approche sur-mesure qui permettrait de mieux répondre aux besoins spécifiques de chaque famille.

Concernant les violences intrafamiliales, la proposition de loi inclut des mesures de protection renforcées pour la femme et l’enfant, en insistant sur la nécessité de prendre en compte les situations de violence lors de la décision de garde. Cependant, certains collectifs féministes craignent que cette proposition de loi soit portée par des associations masculinistes et qu’elle puisse imposer la garde alternée à des femmes victimes de violences. Me Barbara Régent estime que l’article 3 de la proposition de loi constitue une avancée importante en matière de protection de la femme et de l’enfant dans les cas de violences intrafamiliales. Elle souligne l’importance de lutter contre les violences intrafamiliales et de préserver l’intérêt supérieur de l’enfant.

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